croise le regard des autres, adresse un signe de tête ; pas vraiment en avance, mais pas vraiment en retard non plus, j'ai tendance à être ponctuel, à l'heure, à respecter les limites que l'on impose pour ce putain de boulot dans lequel je me plais bien. un poil ennuyant, un poil redondant, mais une occasion en or d'avoir la paix, de manière générale ; et de mettre la main sur quelques joyeusetés que ces stupides solariens cherchent à garder en sureté. que de stupidités, à mes yeux, tant qu'ils confient leurs précieux biens à des types comme moi, de la merde dans les yeux quand ils font leurs choix, à l'évidence ; n'importe qui de censé ne se serait jamais laissé avoir par mon sourire.

je balance mon tee-shirt par dessus ma tête pour passer l'uniforme ; à tout pêter une camisole noire et dorée qu'ils trouvent en adéquation avec les lieux. ce qui me va, tant que je passe sufisamment inaperçu dans mon coin.

jette un coup d'oeil à ma montre, alors que c'est pas encore tout à fait l'heure ; je m'en voudrais d'ôter à sam ses heures de garde tant il a l'air adorer rester debout les bras croisés à fusiller du regard toutes les fées qui daignent se présenter devant lui. me glisse pourtant dans la pièce, jusqu'à mon coin préféré de l'illustre salle des archives, daignant accorder de l'attention à quelques objets protégés sous les vitrines, les connaissant déjà par coeur depuis le temps que je salis le sol doré.

une sensation de chaleur qui fait dresser les poils le long de mon épiderme ; soudaine, brutale et furtive, que je pense avoir imaginée, avant qu'une voix bien trop connue me viennent me percer les tympans. mes dents qui se serrent en réponse, mon sang qui s'échauffe dans mes veines quand je la reconnais elle & que ses propos amers tintent au creux de mon oreille. putain mais qu'est-ce que tu fous là balancé entre mes dents, un peu trop rapidement sans doute ; alors que je l'imagine déjà rire dans mon dos de la surprise qui me tend instantannément, m'arque le dos comme si elle venait de braquer toutes les lumières du début de soirée sur moi.

fort heureusement pas sufisamment stupide pour faire attirer l'attention sur moi, alors qu'elle reprend son petit jeu ; m'adresse son incompréhension teintée de reproches, de venin qu'elle dispense en réapparaissant devant moi ; me laissant un instant interdit alors qu j'essaie de faire le lien entre la gamine que j'ai balancée il y a quelques semaines et la fée qui se tient devant moi. je ne pensais pas la revoir de sitôt, pensais avoir été assez clair sur mes intentions  ; on arrête nos conneries, cassia parce que je pensais qu'elle valait bien mieux que moi, que j'étais une putain d'épine dans son pied et qu'elle m'apporterais rien dont j'aurais besoin, qu'elle était tout ce que je voulais pas ou du moins tout que je n'aurais jamais du vouloir.

la suprends sans doute à mon tour, quand je la pousse contre le fond de l'alcôve ; prévoyant quand à sa stupidité d'être venue me chercher ici exactement, presse mon corps contre le sien pour lui faire lâcher sa posture hautaine que je ne lui connais pas, pour lui faire comprendre qu'elle n'est pas la bienvenue et que sa présence ici pourrait m'être très préjudiciable ;  me demandant à quel point je peux l'avoir blessée pour qu'elle en gagne autant de confiance en elle. trois phrases que je pensais avoir sufisamment éclaircies pour que tu comprennes juré entre mes dents, dans un chuchotement. mes yeux qui rencontre son regard azur ; me demandant à quel jeu cette petite fée pense pouvoir jouer avec moi. ça n'a rien à voir avec de la putain de lâcheté, t'es aussi consciente que moi que c'était une connerie, à deux doigts de balancer que je lui sauve sa putain de vie en l'éloignant de moi, que je la renvoie sur le joli chemin parsemé de fleurs jaunes qu'elle devrait emprunter, quand je retourne dans l'ombre que j'ai partiellement choisie.

qu'est-ce que tu veux prouver, cassia ? alors que je la tiens toujours contre moi, contre le mur ; dans la discrétion de l'alcôve, jurant à moitié qu'on ne se fasse pas chopper là pour ses beaux yeux, ne donne pas cher de ma peau si je perds mon job à cause de son insouciance et qu'ogron l'apprend.

me traite de lâche, encore et encore, alors qu'elle pose ses yeux de vipère sur moi ; que je la pousse vers le fond pour nous mettre à l'abri des regards, que ses talons claquent sur le sol pour me rappeler que cette putain de gamine essaie de foutre soudainnement le bordel dans ma vie en pensant m'amadouer avec sa belle tenue d'aristocrate, sa robe fendue et ses talons qui lui donnent cette putain d'allure de déesse du feu qui me fait craquer. pourquoi faut-il qu'elle me fasse vibrer juste à me regarder avec ses yeux azur, sérieux.

l'air de ne pas répondre quand elle me traite de lâche, me contente de la pousser contre le fond de l'alcôve et de presser mon corps contre ses courbes. je me contente de la fusiller du regard, de lui demander ce qu'elle a à prouver en agissant de cette façon ; et ses accusations qui m'échauffent encore plus. putain mais qu'est-ce que tu me fais là ? la provocation de l'age-gap que j'ai eu un peu du mal à assumer quand j'ai compris qu'elle était vraiment encore une gamine et que le problème c'était moi ; que j'aurais jamais du l'attirer au fond comme je l'ai fais et que j'aurais jamais dû la laisser se brûler les ailes sur moi. ça t'amuserais tellement de le croire, n'est-ce pas ? tu ne manquerais pas d'explications faciles, simples, qui me feraient passer pour le méchant de l'histoire, le ton amer, sec ; sais très bien qu'elle serait la grande gagnante de nous deux si l'histoire était portée à la lumière du jour et qu'elle me balançait en patûre à quiconque voudrait l'entendre. ogron le premier, me tiendrait pour responsable de mes conneries, m'aiderait jamais sur ce coup-là, m'enverrait pêter le détournement de mineurs au cul si ça pouvait m'empêcher de recommencer. et dire qu'elle ne veut pas comprendre... vas-y, pars crier sur tous les toits que je me suis tapé une gamine et que j'suis un connard. vas. comme si c'était le coeur du sujet, comme si elle n'avait pas trouvé mieux pour me provoquer, comme si j'étais pas capable de voir où elle veut en venir.

son image qui clignote, s'efface et revient quand elle évoque les sentiments. comme une ampoule grillée, m'accuse entre les secousses, me provoque pour aller chercher au fond de ma cage thoracique le truc palpitant et carbonisé que je pense ne jamais savoir utiliser. on n'attend jamais de moi que je balance mes sentiments comme bouclier, que je ressente des trucs qui me feraient planter des roses sous ma fenêtre ; non, et elle ne peut pas le comprendre, elle ne peut pas le savoir, elle ne doit pas le savoir, on attend de moi que j'agisse, automate, bourreau, que je me prête porte-parole du royaume des esprits, de ceux qui ne sont plus, qui réclament vengeance à travers ceux qui sont encore là. non cassia, non ; des sentiments, j'en ai pas, je suis au-dessus. du moins j'essaie.

le tu n'avais pas le droit qui résonne dans mon esprit ; oh je n'avais peut-être pas le droit de te rejeter comme je l'ai fais, mais je me le suis donné, parce que je ne me refuse rien quand je suis certain d'être dans mon droit. têtu, égoïste, mais pas lâche, pas inspide alors que je vais au bout des choses quand la décision est prise. je t'ai déjà tout dis entre mes dents serrées, alors que je relève à peine les accusations, encore, qu'elle me jette, me menace d'avoir dérangé sa tranquilité ; comme si elle ne l'avait jamais cherché.

fade ? putain les mots me manquent pour arriver à dire à quel point elle n'avait rien de fade, rien d'insignifiant, rien que j'aurais pu détester si ce n'est qu'elle n'avait rien à faire avec ma vie de minable traqueur, que j'aurais pu la briser à mains nues depuis le début, que j'avais l'excuse parfaite de sa naïveté et de son consentement pour m'en débarasser, pour la livrer au cercle avec tant de facilité que même ogron m'aurait balancé des fleurs à la gueule pour valider l'excellente idée. & la colère qui me fait perdre soudainement la raison, juste quelques secondes ; quelques secondes où je me tâte à drainer la petite luciole clignotante de sa magie, pour la faire taire, la faire cesser ce vacarme incessant dans ma tête qui est le résultat de ma colère et de ces sensations qu'elle fait naître sur mon épiderme. la serre un peu plus fort contre le mur, alors que je refuse de me laisser aller à quoi que ce soit d'imprudent qui pourrait lui envoyer des signes contradictoires, qu'elle pourrait interpréter comme du regret. tu n'as rien de fade, putain. tu fais comme si j'avais eu le choix ! tu fais comme si j'avais pas fais ça pour toi. tu viens là me faire ton caprice, m'accuser de t'avoir séduite, charmée ou que-sais-je que tu irais retourner contre moi ; alors que tu sais très bien, tout comme moi, que t'as plus à y gagner à rester loin de moi. serre mes dents, la relâche partiellement pour lui désigner la sortie, avant qu'il ne soit trop tard, que je ne fasse quelque chose d'autre que je regretterais. dégage lâché un peu plus durement, un peu plus fort que je l'aurais voulu.

je ne veux pas prendre en compte ses sentiments, je ne veux pas porter attention à la peine qui fait scintiller sa magie, je ne veux pas être le catalyseur d'une comédie que je serais incapable de gérer ; parce que si elle reste soixante secondes de plus contre moi, je risque de faire tout ce que je regretterais demain.