L’Univers est ancien. Très ancien. Il a fallut plusieurs millions à cette étendue d’onyx immuable laisse surgir une lumière resplendissante de ses entrailles. Le Grand Dragon, le Feu Blanc créateur, et le Grand Phoenix, le Feu Noir destructeur, en surgirent et leur rencontre mena à une valse de ces deux énergies -opposées, mais non antagonistes- donnant naissance à des sphères-mondes où ils insufflèrent la vie.

La Sphère d’Argaia, à en croire les légendes féériques, aurait vu ses continents naître d’un objet magique à la puissance inimaginable appelé le Chaudron d’Arcadia, appartenant à la première Fée ayant foulé la terre primitive d’Argaia. Ces terres nouvelles -dont beaucoup se déclarent aujourd’hui les propriétaires, à coups de lances, de sortilèges et d’épées- se développèrent au gré des siècles pour devenir ce qu’elles sont désormais. Les vestiges de ces ères lointaines, du temps où le monde était encore sauvage, primitif et insoumis, sont rares. Ils sont enfouis dans les tréfonds, là où trop peu prennent la peine de les chercher.

Nulle mémoire ne subsiste de ces époques éloignées. Les forêts vierges primordiales sont les images qui surgissent à l’esprit à l’évocation de ce passé. Peut-être est-ce parce qu’elles correspondent le plus à ce que découvrirent les premières espèces intelligentes lorsqu’elles commencèrent à peupler ces contrées.

Les Mortels se souviennent à travers leurs récits à quel point certaines régions étaient sauvages à leur arrivée, et combien les expéditions d’exploration étaient importantes. Il existait pourtant aussi des déserts et des landes arides, des terres glaciales, loin du Nord, et toujours une mer interminable qui s’étendait à l’ouest. Les dangers existaient, les prédateurs aussi, rien de comparables cependant avec les conséquences que la Conjonction des Sphères allait engendrer.

Quelle est la première espèce à avoir foulé ces contrées ? Voilà bien le genre de question qui agite les discussions de bon nombre d’érudits sans qu’aucun n’apporte une réponse à la véracité démontrée. Les récits historiques ne s’accordent pas et s’opposent même sur le sujet.

Les Premiers Peuples sont ceux que l’on surnomme les « Peuples Anciens », c’est à dire les Gnomes, les Nains, les Halfelins, les Pixies, les Nixes ou encore les Gobelins. Leur présence sur Argaia remontrait à plusieurs milliers d’années, c’est à dire à une date antérieure à l’arrivée des Fées, à la création des continents par le Chaudron, à la Conjonction des Sphères et surtout, à la venue des Mortels. En ce temps, leur occupation sur les terres primitives était bien plus étendue qu’aujourd’hui. Leur développement s’était réalisé dans une certaine concorde, qui demeure encore avec, par exemple, l’entente et la cohabitation entre les Gnomes et les Nains.

Au regard de l’Histoire globale et du développement des peuples les plus anciens, les Fées, aussi appelées Aen Seidhe, arrivèrent finalement assez tardivement sur Argaia. Elles s’installèrent après avoir débarqué de leurs navires de nacre. D’où venaient-elles ? Cette question a longtemps constitué un mystère, et le demeure encore aujourd’hui pour beaucoup de monde. Certains prétendent qu’elles – ainsi que leurs cousins les Aen Elle– étaient issus d’un autre monde, puisqu’elles possédaient autrefois la maîtrise de l’Enchantix, aussi appelé magie de l’Arcane, permettant de voyager entre les mondes.

Les Fées s’installèrent donc sur ce qui devint l’Insmire et y prospérèrent, se développant d’abord sur les côtes avant de s’aventurer jusqu’aux terres les plus reculées pour y établir leurs différentes cours régies par un Grand Seigneur. Leur savoir faire et leurs talents élémentaires leur permirent de construire de nombreux palais à l’architecture resplendissante, de véritables monuments capables de traverser les siècles.

La présence des Fées perturba l’équilibre établi depuis des siècles. Peuple fier aux aspirations singulières et raffinées, parfois arrogant à l’égard d’espèces considérées comme inférieures -le Petit Peuple, comme ils renommèrent les Peuples anciens-, elles ne cherchent pas à se mélanger et à nouer de véritables liens avec les Nains, les Gnomes et les Halfelins, encore moins avec les Nixes et les Gobelins. La seule exception connue fut les Pixies, dont l’essence se rapproche de la leur, permettant grâce à un lien particulier d’augmenter leurs capacités magiques. Aucun récit historique  ou témoignage ne fait état d’une guerre à proprement parler, bien que des conflits parfois particulièrement sanglants aient éclaté.

Des siècles s’écoulèrent après l’arrivée des Fées lorsque survint la Conjonction des Sphères, qui changea à tout jamais la face d’Argaia et de bien d’autres sphères-mondes. Cet événement cataclysmique -d’une ampleur inégalée depuis- provoqua un déferlement chaotique à travers le cosmos et le temps qui ouvrit d’innombrables brèches temporaires entre les mondes épars. Ces derniers étaient jusqu’alors reliés entre eux par ce que les Fées appellent l’Ard Gaeth, la Grande Porte, un large réseau de liens invisibles et puissants. Une fois cette porte devenue béante, des réalités qui n’avaient rien à voir les unes avec les autres se connectèrent avec violence.

En raison de ces interconnexions, des créatures déferlèrent entre les mondes. Lorsque la catastrophe se termina et que l’Arg Gaeth se referma, une partie de ces créatures se retrouvèrent coincées sur Argaia. Jusqu’alors inconnues de ces contrées, beaucoup parmi les plus dangereuses et les plus invasives, comme l’Attor, bouleversèrent les niches écologiques établies depuis des siècles, ce qui provoqua de profonds dérèglements sur l’ensemble des territoires. Certaines disparurent toutefois, faute de trouver un environnement convenable. Un certain nombre s’adaptèrent, conduisant à une nouvelle ère, pleine de dangers et d’affrontements.

Au sujet des l’arrivée des Mortels sur Argaia, les érudits des différentes races ne s’accordent pas. Les Mortels, bien sûr, prétendent qu’ils étaient là bien avant la survenue de la Conjonction des Sphères. Les Fées et les Nains, quant à eux, affirment qu’ils ne sont arrivés qu’à la faveur du cataclysme. Selon certains récits, les Mortels auraient quitté leur monde -un monde qu’ils avaient eux-mêmes dévasté- à bord de quatre navires, nommés les Bateaux des Exilés, mené par les légendaires Rois Mortels de jadis : Erendor, Sambuk et Abrad le Vieux Chêne.

De ce premier débarquement naquirent trois royaumes au sud de l’Insmire. Ce sont eux qui permirent à l’espèce humaine de s’établir et commencer à prospérer. Dès le début, leur histoire fut marquée par une incapacité à former l’unité. Lorsque les rois ne se retranchaient pas dans leur forteresse pour survivre aux sombres nuits et aux légions de monstres, ils se livraient des luttes incessantes pour la domination d’un fortin ou d’un bout de forêt. Les premiers temps, leurs relations avec les autres races se révélèrent distantes. Les Fées vivaient dans la sérénité des nombreuses villes qu’ils avaient bâties ne s’inquiétant pas outre mesure de ces nouveaux venus. Mais se propager et croître devint pour les Mortels une règle, le moyen d’asseoir une emprise sécurisante sur des terres encore sauvages. Ambitieux et avides de nouvelles conquêtes, ils ne tardèrent pas à étendre les affrontements à l’ensemble d’ Insmire et aux autres races.

Bien vite après leur arrivée, les Mortels combattirent par les armes les peuples qui ne les accueillaient pas à bras ouverts. Les Nains et Gnomes furent les premiers à payer chèrement leurs différences culturelles. Les désaccords mineurs que ces peuples avaient déjà connus avec les Fées ne furent en rien comparables avec ce que leur opposa l’esprit belliqueux des Mortels. Face à la haine et la volonté de domination de ces derniers, ils n’eurent d’autre choix que de céder leurs territoires en émigrant vers d’autres continents d’Argaia.

Les Fées, quant à elles, ne cherchèrent pas la confrontation, les anciens souhaitant à tout prix éviter une guerre. Dû à leur développement démographique relativement lent, elles ne prirent que trop tardivement conscience de la vitesse à laquelle les Mortels se multipliaient. Le rapport de force se renversa. Afin de contrer et punir les belliqueux, les Fées s’unirent aux Aen Elle sous l’étendard du Royaume Féérique de Domino, profitant de leurs pouvoirs pour réduire leurs ennemis en esclavage.

Deux siècles s’écoulèrent sans que les tensions entre les Mortels et les Fées ne décroissent. Elles atteignirent même le comble de la violence lorsqu’un Mortel du nom de Jurian prit la tête de la rebellion en tant que chef des armées mortelles. Si certains Grands Seigneurs de Domino étaient en faveur de l’esclavage, d’autres y étaient fermement opposés. Le Roi de Domino faisait parti de ces derniers et ordonna aux Fées et Aen Elle de libérer leurs esclaves.

Certains enfants Mortels se mirent à développer des aptitudes magiques au travers du Feu Noir, qui, s’il n’était pas correctement canalisé, était susceptible de représenter un danger autant pour eux-mêmes que pour autrui. Certaines Fées pour la libération des Mortels les aidèrent donc à canaliser cette énergie opposée au Feu Blanc qu’elles employaient, laissant percevoir un relâchement des tensions entre les peuples.
Malheureusment, en dépit de la générosité du Roi féérique, Jurian, le général des armées mortelles, mena ses troupes au coeur de l’académie magique d’Alféa où il perpétra un carnage, tuant les Fées adultes comme les enfants.

C’est alors qu’Argaia s’embrasa dans les flammes et le sang. En Insmire, la Night Court aida le Roi de Domino avec ses armées d’Illyiens, des Fées guerrières redoutables, pour se battre aux côtés des Mortels pour leur libération. En Insweal, Hybern, le royaume des Aen Elles, préféra assassiner tous ses esclaves plutôt que d’être contraint à les libérer, avant d’envoyer ses plus grands commandants participer à la guerre, décision soutenue en Insmire par la Spring Court.

L’ultime affrontement de ces guerres dominiennes eut lieu à Shaerrawedd, dans un bain de sang et de larmes si intense que les deux parties convinrent de signer un accord de paix afin de mettre fin à cela. Le Traité des Mortels et des Fées fut alors signé, assurant la liberté des Mortels et une barrière magique fut érigée pour séparer les royaumes féériques des terres mortelles rendues.

Quelques décennies après la fin de la Guerre des Mortels, les Aen Elle -réfractaires à la signature du Traité des Mortels et des Fées puisque leur commerce reposait essentiellement sur le travail des esclaves mortels-, envoyèrent l’émissaire Marion Amarantha dans chaque cour féérique d’Insmire afin d’y répandre des nouvelles pacifiques et une volonté de rédemption quant à leur passé. Cela n’était qu’un subterfuge pour attendrir les Grands Seigneurs et le Roi de Domino avec des idées sur un partage de culture et des richesses entre les continents grâce à de nouveaux accords commerciaux. Marion Amarantha déroba le pouvoir des Grands Seigneurs et se proclama Grande Reine d’Argaia, établissant son royaume au creux de la Montagne Sacrée d’Insear.

Durant le règne de terreur d’Amarantha, une Plaie Eternelle -phénomène résultant de la Conjonction des Sphères pouvant prendre de nombreuses formes telles que des inondations qui rencontrent le ciel, des incendies que l’eau ne peut désaltérer ou encore des monstruosités qui rampent ou volent- se propagea sous la forme d’une Pluie Ecarlate qui se déversa sur l’Insmire et empoisonna les créatures présentes. Seule la magie des Héritiers put en venir à bout, si bien que Marion Amarantha, détentrice de la Flamme du Dragon, l’état le plus pur du Feu Blanc, s’associa à eux pour mettre un terme à cette Plaie Eternelle.

Les Héritiers du Phoenix se montrèrent si efficaces dans cette tâche que le nombre de créatures décrut progressivement sur Insmire. S’ils se voulaient être les protecteurs d’Argaia grâce à leur don rare, leur présence et leur existence furent malheureusement bientôt décriées à travers cette association avec la Reine Marion. On les surnomma alors les Sorciers Sanguinaires, dont la soif de sang n’avait d’égal que la cruauté de la Reine à laquelle ils avaient choisi de s’associer.

Afin de mettre un terme au règne de la Reine Usurpatrice, les Grands Seigneurs des Day, Summer et Winter Courts se rebellèrent, mais sans parvenir à leur but. La Grande Reine Marion employa la Flamme du Dragon pour lier les Fées à terre en leur retirant leurs ailes et leur capacité à employer l’Enchantix. Elle transforma ses rivaux en créatures monstrueuses appelés les Brûlés qui séviront dans tout le royaume de Domino, telles une nuée qui se répandit parmi les populations pour accroître leur nombre. La barrière protégeant les terres mortelles fut abattue, menaçant alors celles-ci qui prirent alors les armes pour défendre leurs territoires.

Les plus puissantes Fées s’unirent avec le Roi Oritel de Domino et formèrent la Première Compagnie de Lumière, qui, aidée des Héritiers, menaça le régime mis en place par la Grande Reine Marion. Cette dernière sentant son pouvoir décliné, décida de s’enfermer dans le Royaume des Ténèbres, une sphère-monde plus communément appelé l’Obsidienne.

Malgré l’aide des Héritiers du Phoenix, l’Histoire ne retint que leur participation aux côtés de la Reine Marion l’Usurpatrice, si bien qu’une Purge fut entamée afin d’anéantir les Sorciers Sanguinaires. La haine s’attisa parmi les populations désormais libérées grâce aux actions d’Emhyr var Emreis, Grand Seigneur de la Day Court qui prit la relève du Roi Oritel à la chute du Royaume de Domino après la guerre. L’assaut mené contre l’école du Grand Phoenix, la principale forteresse des Héritiers, fut la plus éprouvante de tout l’Insmire. Ce jour funeste vit d’innombrables morts parmi les assaillants, et presque tous les Héritiers du Phoenix qui étaient présents entre les murs de leur forteresse périrent. Après ce tragique événement, les Héritiers ne retrouvèrent jamais leur grandeur d’antan, devenus les ennemis principaux du nouvel Empire Solarois et des Royaumes Mortels, les menant à une vie de nomades dissimulés parmi les Mortels pour n’éveiller aucun soupçon.