La journée avait été l’une des pires de sa vie. Non pas que quelqu’un était mort ou qu’une si triste nouvelle s’était abattue sur Diaz, néanmoins son « rendez-vous » avec l’angelot s’était terminé, une fois de plus, avec des traces que le fée devait cacher. Bien que cela était devenue une habitude, la fatigue s’emparait du jeune homme vis-à-vis de cela. Pourquoi ? Il ne comprenait rien. Ce n’était pas comme si le blond montrait des signes d’affections à son encontre. Juste de la violence et des abus… le plus étrange dans tout cela ? Une partie de Diaz en voulait encore et toujours. Etait-ce vraiment le cas ? Ou bien les émotions du blondinet qui l’envahissait et prenait le dessus ?

Notre brun ne voulait pas y réfléchir, c’était trop. Rentrant chez lui, il commença à penser ses blessures et mettre des pansements sur les morsures profondes qui s’étaient désormais installées sur la peau basanée du jeune homme. A voir cela, n’importe qui penserait que Diaz s’était fait attaqué par un animal sauvage… oui, mais qui marche sur ses deux pieds.

Ayant presque fini, Diaz vit qu’il était en manque de pansement. Soupirant, le bel-âtre se décida d’aller en acheter en pharmacie… encore une visite si tôt ? Les vendeurs commenceraient à se poser des questions. Alors une merveilleuse idée vint à son esprit ; la maison familiale. A cette heure, personne n’était présent, de plus, cela faisait un moment que le fils ne s’était pas présenté à ses parents. Diaz n’avait qu’une chose à faire : acheter un petit bouquet pour faire plaisir à sa mère.

Sur le chemin, le bon fils prit les fleurs préférées de sa maman d’adoption, il savait comment s’y prendre avec cette mère poule qui avait tendance à trop les couver. Vraiment ? Diaz qui l’aimait de tout son coeur, l’avouait malgré tout : cette maman, elle était trop sur-protectrice. Sachant cela, l’évidence même sonnait dans l’esprit du torturé : elle ne devait surtout rien savoir.

Arrivant, Diaz prit un vase, afin de déposer les fleurs dedans avec une bonne quantité d’eau. Le vase ornait désormais la table du salon, tandis qu’il se dirigea vers la pharmacie bondé de sa mère pour finir ses affaires. Les produits étaient tant nombreux que Diaz doutait de la possibilité que sa mère se rende compte de quelque chose. Et puis… ce n’était toujours que quelques pansements. Les bandages, Diaz les avaient pris chez lui.

Terminant, le tout, Diaz se rendit dans le salon, soufflant de soulagement. Sa mère n’était pas encore arrivée, mais vu l’heure, ce n’était plus qu’une question de minute.

S’installant, il prit son téléphone, vérifiant qu’aucun message annonçait une catastrophe pour ce soir. A priori, tout se passait bien, ce qui soulageait le blessé.

La porte s’ouvrit, la voix familière de sa mère retentit. Ne soufflant mot, Diaz attendait en souriant, et connaissant sa maman, il savait pertinemment le plaisir qu’elle aurait de le voir, même à l’improviste.

La réaction fut exactement celle qu’il avait imaginé. Se levant, il s’approcha d’elle, lui répondant :

« Mère, c’est un plaisir de vous revoir. »

Après un échange de bise, il ajouta :

« Comme à mon habitude mère, je me porte comme un charme. Et vous ? »

Les vêtements amples de Diaz cachait les quelques kilos qu’il avait encore perdu avec toutes ses histoires et il espérait sincèrement qu’elle n’allait pas lui en parler. Se contenter du strict minimum pour donner l’impression que et ensuite partir, voilà le plan de base… oui de base, n’oublions pas qui se trouvait en face de lui.

La mère de Diaz n’était pas une maman pour rien. Son instinct était même sans nul doute dans les plus poussés qui soit. Diaz sentait que sa mère n’était pas totalement dupe, elle se doutait de quelque chose. Ce n’était pas un élément que son pouvoir lui permettait de ressentir, mais la connaissant, le brun s’en doutait.

Affichant toujours son sourire, c’était la meilleure arme de Diaz, son masque de prédilection, comme il l’avait toujours fait. Voilà maintenant bien des années que Diaz et Elain se connaissait, et comprenaient leurs fonctionnements. Diaz l’aimait comme si elle était sa mère, néanmoins quelque chose bloquait. Même s’il le désirait, il ne parvenait pas à réellement la considérer à cent pour cent comme tel… pire encore, le sentiment de ne pas être à sa place et de devoir jouer un rôle de perfection le tenait toujours. C’était étrange,  lui qui s’était partiellement senti apaisé pendant un temps se retrouvât très vite à nouveau submerger par ces angoisses.

Ne lâchant pas son sourire, il ricana lorsqu’elle lui demanda s’il ne réalisait pas son petit numéro de charme. Diantre qu’elle le connaissait bien cet enfant. Elain l’attrapa par le menton pour voir les traits se creuser sur son visage mais ne dit mot. Diaz se doutait qu’elle avait compris la perte de poids. Après tout, elle était une merveilleuse mère dévouée et très observatrice… Diaz l’aimait entre autres pour cela.

Lui faisant un baise-main (oui, même à sa maman on peut en faire, d’abord!), il lui répondit sur un ton calme, posé et délicat :

« Vous savez très bien que je vous charme depuis mon enfance mère. » Réalisant une petite pause, il ajouta : « Je me porte bien, soyez sans crainte. Le jour où je serais à l’hôpital, là, je ne serais pas en forme. »

Tentative pour noyer le poisson, il fut ravi de la voir se concentrer sur les fleurs, toujours un bon plan d’en offrir.

« Il me semble que vous les appréciez. Je ne pouvais pas venir vous voir sans rien. »

Puis, tandis qu’elle se déplaçait dans la cuisine, la question réponse vint : le repas. Diaz n’avait pas très faim, pire encore, il ne savait pas si beaucoup de choses passeraient. Pourtant, Diaz sentait qu’il devait rester, ne serait-ce que pour rassurer sa mère.

Soupirant comme pour lui-même, il redressa la tête et ajouta :

« Bien évidemment. Je ne vais pas me sauver comme un petit sauvage. »

Bien qu'en réalité, c'était l'idée de base... pas le choix, il devait rester pour ne pas éveiller les soupçons.

Alors Diaz prit son téléphone pour prévenir Alisson qu’il ne serait pas là ce soir, repas avec sa mère obligeait. Pourtant, un autre message reçu le fit blêmir. Un message qu’il ne prit même pas la peine de lire, verrouillant plutôt l’engin électronique.

Se raclant la gorge, Diaz se reprit tout en se dirigeant vers la cuisine. S’il devait manger ici, hors de question qu’il reste à ne rien faire. Observant sa mère, les mots sortirent naturellement :

« Que dois-je faire pour aider ? »

Sans même attendre la réponse de sa maman, Diaz s’approcha de la bouilloire afin de leur préparer du thé. Rien de mieux que cela pour cuisiner en même temps, en tout cas, c’était l’avis de Diaz et cela évitait qu’il picore un peu de tout alors qu’il cuisine.

Le jeune homme ne savait pas trop comment s’y prendre parfois. Il voulait pouvoir être totalement sincère, mais savait que s’il le faisait, la tristesse, la colère, voir la rage envahirait sa maman. Elle pourrait perdre un instant le contrôle de ses pouvoirs, mais le pire, se serait pour Diaz. C’était aussi par égoïsme qu’il faisait cela. Après tout, qui pouvait supporter de telles émotions auprès d’un être cher ? Diaz ne voulait pas d’émotions négatives pour ses proches, cela lui faisait trop mal au coeur, rien que d’imaginer cela, c’était insupportable pour lui. Alors le jeune homme avait décidé de cacher les choses.

Diaz sourit à la remarque de sa mère. Ne pas abuser de jouer de ses charmes ? Si seulement elle savait, c’était la meilleure arme défensive que le jeune homme possédait pour se sortir de situation embarrassante. Mais quand elle parla de gris pour nuancer le blanc et le noir, Diaz se sentit prit au piège. Est-ce qu’elle savait ? Clignant des yeux et se contentant de conserver son sourire, il ne répondit pas à cela. Le ténébreux n’ajoutait rien, mais dans son esprit, si. « Si tu savais maman, le gris serait une douceur comparée à l’enfer qu’il me fait vivre… je n’en peux plus maman. » Heureusement qu’elle regardait ailleurs, il put retenir ses larmes. Fait amusant d’ailleurs, il vouvoyait sa mère à l’orale, mais la tutoyait en pensé. Marque démontrant qu’il existait toujours un faussé entre les deux adultes sur cette relation mère/fils.

« J’en avais juste envie. » Et c’était vrai. Diaz n’aimait pas venir les mains vides. C’était entre autres de part sa bonne éducation, mais pas seulement. Pour lui, c’était aussi un geste pour dire « merci ». De la présence, de tout ce qu’elle avait fait pour lui. Un merci qui resterait éternellement présent.

Sa mère réalisa un chignon flou pour se mettre à préparer le repas. Diaz aimait voir cette manière de faire, à la fois élégante et libre. Certes, il n’avait pas d’obligation, néanmoins cela faisait plaisir au jeune homme de pouvoir aider sa maman.

Finissant de préparer le thé, il but une gorgée du sien tout en déposant celui de sa mère vers elle. Puis, il commença à rassembler les divers éléments pour mettre la table. Ecoutant sa question, il lui répondit : « Ca se passe bien à l’Archange. Le succès est présent et on envisage les prochaines soirées à thèmes pour changer un peu les ambiances. Les petits apéritifs préparés par la cuisine ont un succès fou. » Puis, passant vers elle pour piquer un petit bout de pomme, il ajouta : « Sinon, pas grand-chose de plus, c’est un peu la routine, bien qu’un souci de fournisseur se soit produit. Ils ont fait faillites, mis la clé sous la porte avec dépôt de bilan, sauf que nous, ben on avait des commandes en attente de livraison, je te dis pas le bazar. Je ne sais même pas si nous pourrons être remboursés. » Faisant une pause pour soupirer, il adressa un sourire à sa maman en ajoutant : « Ne vous en faites pas mère, il ne s’agit pas de sommes astronomiques. C’est plus par question de principe. »

Parce que honnêtement, le bar fonctionnait tellement bien, que Diaz envisageait d’ouvrir un second établissement dans une autre ville d’ici quelque temps, sous condition de régler ses soucis privés d’ici-là.

Parfois il était préférable de faire comme si nous n’avions pas entendu certaines phrases, certains mots qui ne nous mettaient pas à l’aise ou bien amenaient sur une conversation que nous ne voulions pas. Diaz était ce genre de personne, s’il pouvait éviter un conflit ou simplement une situation gênante, tel un lâche il le faisait. Certes, la condition était que cela ne le touche que lui. En aucun cas Diaz laisserait une personne qui lui était chère dans le besoin. S’il fallait se battre pour les autres, d’accord, mais pas pour lui. Non, c’était trop difficile…

Le jeune patron avait beaucoup de chance d’avoir une mère comme la sienne, même si elle n’était pas de son sang. Diaz n’avait rien relevé sur sa remarque et elle ne creusa pas. Une chance pour lui ! Si elle avait continué, dieu seul sait si Diaz aurait tenu le coup.

Le fée de l’esprit ne savait pas comment fonctionnait une maman, il n’était pas au courant de certains aspects de cette situation. Ce fut toujours étrange pour lui qu’elle soit toujours là, à se faire du souci, parler comme s’il avait encore sept ans. Mais il ne s’en plaignait pas non plus, c’était un aspect de la personnalité de sa mère pour lui, rien de plus. Alors qu’en réalité… c’était bien plus que cela.

Suite aux informations qu’il donna quant à son problème de fournisseur, en évitant bien évidemment de mentionner certains aspects, sa mère lui répondit positivement. Ce projet lui tenait à coeur… si seulement elle savait à quel point. Et en même temps, il ne pouvait pas lui dire que c’était aussi une échappatoire, parce qu’il ne savait pas quoi faire de sa vie sinon. Il était doué pour ce qu’il faisait, mais sinon, dans quoi aurait-il pu être bon ? Presque toute la famille travaillait dans la politique, une chose dont il avait horreur et qu’il voulait éviter à tout prix. Il se contenta de lui sourire tout en prenant une gorgée de thé. Ave le temps d’hiver qu’ils avaient, cela ne pouvait que faire du bien.

Puis vint la demande de nouvelles de sa sœur. Ricanant légèrement, il se doutait qu’elle parlait d’Isis et non pas de Cassia qui était encore à Alféa. Posant la tasse, il lui répondit : « Elle va bien, fidèle à elle-même. Que dire de plus ? Ma sœur est la reine des cocktails et n’en loupe pas une pour se mêler de ma vie sentimentale. » Oups, bourde de commise, ne pas lancer maman sur ce sujet. Si bien que le jeune homme ajouta rapidement « Qui est déserte. » Certes, les histoires d’un soir étaient toujours présentes, son sexfriend et meilleur ami Dean, avec qui il pouvait toujours prendre du plaisir, mais une vraie histoire, de Heava, il n’y en avait pas eu. Et Diaz ne voulait surtout pas que sa mère pense qu’une nouvelle était dans sa vie. Le pire serait qu’elle pense des choses pour Ophélia et lui. Ils étaient meilleurs amis et certes très proche, mais Diaz ne pouvait pas penser à quelqu’un d’autre que son tortionnaire.

Voulant essayer de noyer le poisson, Diaz reprit de plus belle une fois qu’il eut sorti les assiettes : « Vous devriez venir manger à la maison un de ces quatre avec papa et Cassia. Cela vous permettrait de voir une partie de l’équipe… et de t’assurer que l’on vive en mangeant bien et dans une maison bien tenue. » Il connaissait sa mère, elle était capable de s’inquiéter de la propreté de son lieu de vie et de son alimentation. Déposant les assiettes sur la table, le jeune homme retourna en cuisine prendre les couverts.

Diaz naviguait entre la cuisine et la table pour tout préparer. C’était une vieille routine qui lui rappelait de bons moments, surtout quand les soucis n’étaient pas encore présents. Prenant les couverts, Diaz se remémora la première fois où il était venu les chercher. Hésitant, il ne se souvenait plus du tiroir et craignait de se faire gronder, mais non. Elain avait toujours été douce et bienveillante… des qualités que Diaz aimait énormément chez elle, lui permettant de se sentir à sa place dans la famille… un peu.

Heureusement, sa mère ne parla pas d’Haeva. Elle aurait été la parfaite belle-fille, autant le dire. Fut un temps où le fae de l’esprit se voyait faire sa vie avec cette demoiselle, fonder une famille… hélas les choses se passèrent différemment. Avec le temps, Diaz avait tourné la page. Certes, l’angelot avait aussi bien participer à détruire tout ce qui existait entre lui et la demoiselle. Tout du moins, Diaz préféra tout couper par mesure de sécurité pour sa belle. Désormais, elle était la meilleure amie d’Ophélia, qui était elle-même la meilleure amie de Diaz, sans plus.

Elain sortit Diaz de ses pensées, trouver la personne qui lui correspondait ? Si seulement. Mais pour cela, il aurait été nécessaire de s’occuper de l’angelot.

Voyant sa mère d’appuyer sur le plan de travail pour siroter son thé pendant qu’il mettait la table, Diaz écouta sa réponse. « Maniaque tout de suite, non. Jamais. » Et fit un signe signifiant ‘un tout petit peu’, avec un sourire taquin. Elle acceptait, chouette. Par contre… convaincre sa sœur ? Alors qu’elle passait son temps à le fuir ? Dur dur. Diaz haussa les sourcils et fit signe ‘d’accord’. Il enverrait Iris au pire des cas.

La porte se fit entendre, le papa venait d’arriver. Voyant son père, Diaz fit signe ‘coucou’, un peu timide. Il avait toujours été ainsi avec lui… c’était pire qu’avec Elain. Mais Diaz l’aimait tout autant. Diaz lui dit : « Salut. » Comment lancer la conversation ? Que dire ? Diaz avait toujours eu cette impression de rendre sa famille, surtout son père, déshonoré parce qu’il n’avait pas voulu entrer dans l’armée ou travailler dans la politique. Créer une boite de nuit n’était pas nécessairement l’activité la plus distinguée dont des parents pouvaient se venter. Pourtant ils n’avaient rien dit… mais Diaz restait malgré tout un peu embêté. Ne sachant pas trop quoi faire, il fit signe se diriger en cuisine avec un : « Je file voir ce que je peux faire pour aider. »