De l'alcool, et de préférence en grande quantité. C'était pas la meilleure solution, mais c'était ce dont Dean avait présentement besoin. Un moment seul pour finir de digérer ce qu'il avait récemment appris... Ce n'était pas de gaîté de cœur que le sorcier s'était installé au comptoir avec l'intention d'boire assez pour faire à minima trois comas éthyliques, mais c'était la seule façon qu'il avait trouvé pour faire taire les mots de Diaz et les images qui s'étaient incrustées dans son crâne. Et il voulait juste arrêter de réfléchir un moment. Ou bien peut-être que l'alcool lui permettrait d'établir un plan pour tuer Tom et se débarrasser définitivement du problème ? C'était Marius, le tueur du groupe... Lui... Lui pas vraiment. Non pas qu'il ne s'en sentait pas capable, pour Diaz. Mais ça n'en enlevait pas moins l'horreur de la chose, et l'angoisse... Il voulait juste pouvoir le protéger. Le visage s'enfouit un instant dans les mains, il se frotta les yeux pour essayer de chasser par la même les sentiments qui refluaient dans sa cage thoracique. Diaz. Il n'était pas là à l'Archange ce soir, appelé par des obligations extérieures et c'était sans doute pour le mieux. Cela permettait à Dean de faire une pause dans son travail, et l'regard se posa sur Ophélia, en train de donner un coup de main derrière le comptoir.  « Tu savais, alors? » Question posée à la fae alors qu'elle se rapprochait de lui, et il vérifia une seconde qu'aucune oreille indiscrète ne pouvait les entendre alors qu'il ajoutait, plus bas :  « Il t'a parlé de Tom ? » Il ne pouvait qu'espérer qu'elle connaisse le prénom de l'intéressé, sinon et bien... Il passerait pour un idiot, chose assez fréquente ces derniers temps. Il n'avait pas demandé la permission pour se servir un whisky et attrapa son verre pour y porter les lèvres, les trempant dans la boisson. Le goût amer envahit sa gorge, trompant son cerveau une seconde pour l'emporter loin de l'acidité qui coulait dans ses veines. La trahison était présente, bien que pardonnée. Il n'y avait pas encore beaucoup de clients à cette heure de la journée, plus proche de la fin d'après midi que du début de soirée. Les yeux ne quittaient pas l'autre. L'autre meilleure amie. L'autre fae. Le genre avec qui Diaz n'avait pas besoin de se cacher, contrairement à lui.  « J'crois que j'ai envie de le tuer. » Tom, évidemment. Pas Diaz. Jamais Diaz. Il refusait encore de poser des mots plus précis sur ce qu'il ressentait, autre que ceux déjà existants. C'était un merdier émotionnel dans lequel il avait la sensation d'être englué jusqu'au cou. Il attendait pas d'Ophélia qu'elle résolve ses problèmes, mais il avait besoin de parler et elle était là... Et elle savait, elle aussi, alors ça suffisait au sorcier comme excuse pour aborder le sujet.

Du repos. Voilà tout ce à quoi aspirait Ophélia. Non pas qu'elle était épuisée, loin de là, elle était encore jeune et pleine d'énergie mais elle avait l'impression que son mental, lui, en absorbait plus que de raison. Comme toujours en soit, mais que cette fois-ci il voulait quelques jours pour ne penser à rien. C'est dans cette perspective -celle de ne penser à rien- qu'elle comptait finir la journée bien que de service ce soir. Comme à son habitude, elle s'activait derrière le comptoir afin que tout soit en ordre en essayant de ne penser à rien, se concentrant sur la musique calme qui résonnait doucement à l'Archange. Elle n'avait pas vu Diaz de la journée, et n'avait pas eu de nouvelles depuis Starfall l'avant veille. La petite fae avait longuement hésité à envoyer un message à son meilleur ami pour le remercier et savoir si tout allait bien mais avait jugé bon de lui laisser un peu d'espace après une épreuve telle que l'avait été la soirée de Starfall avec toutes ces personnes autour d'eux. Le fae de l'esprit avait sans doute besoin d'un peu de temps pour reposer son mental lui aussi et Ophelia respectait cela tâchant de ne pas s'inquiéter. Des nouvelles, elle en prendrait plus tard à la pause auprès des nombreux colocataires de son patron.

Absorbé par son travail elle venait tout juste de remarquer la présence de son ami Dean qui lui adressait la parole. Enfin, elle ne savait pas trop s'il s'adressait à elle ou à quelqu'un d'invisible mais cela la fit s'arrêter en face de Dean l'observant avec un peu plus d'intérêt face à son comportement soudain étrange. Depuis quand l'homme de ménage regardait autour de lui comme pour assurer ses arrières, à l'affût d'un éventuel prédateur? Et cette bouteille à côté de son verre...

Perplexe, la fae tendit l'une de ses mains en s'adressant à son ami.
Hop! Ca, ça retourne à sa place! Ophelia prit la bouteille posée à côté du brun dans l'optique de la ranger assez loin de lui. Il avait une tête à faire peur. Quelque chose n'allait pas, elle n'avait pas l'habitude de le voir assis au bar à siroté plus que de raison et les mots qui sortirent de nouveau de la bouche de son ami le lui confirmèrent.  
Que l'alcool mène à l'ivresse? Oui. Tenter une pointe de plaisanterie pour ne pas rester les yeux grand ouverts comme un poisson globe ignorant ce que voulait dire Dean. Bon sang, elle qui avait réussit à se couper de toute pensées jusque là... Elle maudirait le karma plus tard si besoin se concentrant sur celui qui semblait avoir besoin de lui parler à elle et à personne d'autre. Etrange.

Qui? Bon sang mais à combien de verres était-il? Soit il avait bu avant de venir travailler soit il s'était déjà enquillé une bouteille puisque celle que la fée tenait dans ses mains était à peine entamée. De qui pouvait il bien parler? Qui étaient ce "Il" et ce "Tom"? Si c'était un jeu de devinette elle n'avait ni le temps et n'était pas d'humeur. Le travail n'était pas encore terminé et l'heure tournait inlassablement.

Ok! Alors la violence ne résous rien et ensuite si tu me disais exactement ce qui te tracasses plutôt que de me faire des phrases incomplètes. Je ne comprends pas de qui ni de quoi tu parles, Dean.

Il y avait clairement un problème qu'Ophelia serait sans aucun doute incapable de résoudre mais elle serait, comme toujours, une bonne oreilles pour son ami. Elle tenterait de le réconforter si besoin en le serrant fort dans ses petits bras aussi mou que son cœur. Et si besoin, elle appellerait de l'aide auprès de celui ou celle de leur bande qui serait le plus proche d'eux. La jeune fée des ténèbres posa sa main libre sur l'une du brun dans un élan d'encouragement mais surtout pour lui assurer son soutien tout en plongeant ses yeux clairs dans son regard. Elle n'était pas des plus fûtée mais elle pouvait sans difficultés y voir de la colère, de la tristesse, du désarrois. Un mélange de tout ça et autre chose qu'elle était incapable de nommer. La brunette avait déjà vu ce genre de regard, une fois, lorsque Diaz, ivre et désemparé lui avait avoué l'inavouable. Non! Cela ne pouvait pas être ça! Impossible.

Dean?

Hop! Ca, ça retourne à sa place! Le geste tira à Dean un grondement mauvais. Il avait pas à demander la permission, merde. Pour une fois, ça allait tuer personne qu'il se serve. Après tout ce qu'il lui avait balancé, Diaz lui devait bien une bouteille, de toute manière. Il fusilla la fae du regard avant de se pencher par dessus de le comptoir à la recherche d'une nouvelle victime à soustraire. Que l'alcool mène à l'ivresse? Oui. Elle ne comprenait pas. Elle aurait pourtant dû. Il lui avait dit pour Tom. Pour l'autre connard qui avait fait de la vie de Diaz un enfer. Merde. Pourquoi fallait-il toujours qu'il passe pour le crétin de service ? C'était ça en fait. On se foutait de sa gueule depuis le début. Quelqu'un allait sortir de derrière une porte en criant : c'était un prank. Et Diaz et lui, ils reprendraient une relation normale. Et tout ça serait oublié... Il n'y aurait pas de Tom, pas de spécialiste, pas de violence. Pas de je t'aime balancé dans la figure comme un os à ronger. Tiens, attrape Dean. Il tenta pourtant d'éclaircir la chose, balança le prénom avec l'espoir de voir apparaître dans les yeux de l'autre une lueur de compréhension... Mais rien. Qui?  « P'tain Ophé, tu le fais exprès ?!? » L'agacement était présent, mais il tenta rapidement de l'éteindre en prenant une nouvelle gorgée du verre qu'il s'était servi et que la fae avait daigné lui laisser. Il n'avait même pas bu, avant. Rien du tout. Encore heureux... Ok! Alors la violence ne résous rien et ensuite si tu me disais exactement ce qui te tracasses plutôt que de me faire des phrases incomplètes. Je ne comprends pas de qui ni de quoi tu parles, Dean. Elle se rapprocha de lui, posa sa main sur l'une des siennes. Les yeux se croisèrent, et voyait bien qu'elle essayait d'être là. Une bouée jetée à la mer, qu'il aurait jamais espéré trouver chez la brune. Il aurait peut-être mieux fait d'aller voir ailleurs lui aussi. Faire comme Diaz, avoir des « occupations extérieures ». Pourvu qu'il soit pas aller voir Tom. L'idée l'avait même pas effleuré, et d'un coup, il se liquéfiait sur place. Et s'il était allé le voir, ce soir ? Il avait promis à Diaz qu'il ne le toucherait plus. Mais si ça se trouve ça se produisait, à l'instant même où il avait l'idée idiote de se mettre une mine. Quel meilleur ami en carton il faisait. Comment aurait-il pu le considérer en le voyant ainsi ? Qu'est ce qui pouvait bien seulement lui faire penser que Dean était un bon parti ? Dean? « Diaz tu sais... » Merde. Toujours Diaz. Fallait qu'il respire, qu'il remette de l'ordre dans sa tête avant de parler, parce qu'il se rendait compte que ce qu'il disait n'avait ni queue ni tête et que la prochaine action d'Ophé serait surement d'appeler un hôpital psy si jamais il se reprenait pas.  « Pardon. C'est juste que Diaz m'a parlé du gars. Tu sais aussi... hin ? Il m'a dit... » Le verre de whisky trouva à nouveau le chemin des lippes, un soupir échappé avant que la main n'accroche celle de la fae pour l'empêcher de s'en aller, au cas où l'idée de le laisser là lui vienne.  « Il m'a dit qu'il t'en avait parlé, Ophé. » Et il était assez sobre pour que ce soit vrai. Comme le reste. Comme tout le reste ? Les Heivoris étaient pas une de ces hautes familles, là ? Un mariage arrangé, voilà c'qui l'attendait, l'autre.  « S'il te plait, me dis pas que tu sais pas, je SAIS que tu sais. »

 Dean avait grogné tel un rottweiler à qui on venait de retirer son os lorsqu'Ophelia avait récupéré la bouteille. Mais la fae n'y avait pas prêté quelconque attention. Il était hors de question pour elle que son ami se saoule alors elle faisait en sorte qu'aucune autre ne traîne de son côté du comptoir. Ses paroles bien que compréhensibles ne faisaient pourtant pas pas mouche dans la tête de Lili qui ne voyait pas ce qu'il essayait de dire. « P'tain Ophé, tu le fais exprès ?!? » Si seulement, elle aurait l'air moins débile de ne pas comprendre. Et pourtant elle ne laisserait pas son ami aussi mal c'est pour cela qu'elle avait délicatement créé un contact manuel pour ne pas le brusquer mais pour lui montrer qu'elle était là pour lui. Pour lui venir en aide autant qu'elle le pourrait. Si bien qu'après une dernière demande, un obus tombait sur elle en réponse.

A l'entente de ce nom, le coeur d'Ophelia manquait un battement. Est-ce qu'il lui était arrivé quelque chose et c'était la raison pour laquelle il était absent aujourd'hui? Etait-il allé se jeter dans la gueule du loup après avoir tout avouer à son meilleur ami? Non. Il n'avait pas pu lui dire. Et pourtant la réponse à sa question silencieuse lui parvint. Dean parlait bien de l'homme qui faisait souffrir leur Diaz depuis des années.

Ophelia gardait le silence ne sachant trop peu comment réagir. Oui. Oui elle savait. Pour seule réponse, elle serrait à son tour la main de son ami. Elle avait sagement écouté Dean vider son sac et répondre à ses interrogations sans l'interrompre dans sa lancée. Ce n'est qu'une fois le silence retombé qu'elle se pinçait la lèvres avant de parler.
Dean... Par où commencer? S'excuser de connaitre un tel secret que lui, le meilleur ami de Diaz ignorait? Dean devait tellement se sentir trahit qu'Ophelia avait presque peur de sa réaction. Elle pourrait nier, après tout, peut-être qu'il bluffait... Non, vu sa tête ce n'était pas du bluff mais bien de la douleur, de la colère... Oui elle savait. Diaz lui avait tout avouer alors qu'il avait bu pour tenter d'oublier. Elle avait été là pour lui et l'avait écouté. Gardant le secret durant tant d'années sans savoir que faire pour lui venir en aide.

Je ne connaissait pas son nom... Pause. Que dire pour se justifier? Pour soulager son ami? Elle voyait la détresse dans son regard, dans ses gestes et elle ne voyait qu'une chose pour apaiser ce genre de comportement: lui faire un câlin. Malheureusement le zinc les séparant ne lui en offrait pas la possibilité, de plus, est-ce que Dean se serait laisser faire? Elle n'en avait aucune idée. Diaz oui, c'était leur mode de fonctionnement. Serrer l'autre dans ses bras pour l'apaiser, et cela fonctionnait toujours. Avec Dean, elle ignorait si cela fonctionnerait, s'il la laisserait le toucher.
On va aller s'installer sur une des banquettes, d'accord? On pourra en discuter... Calmement? Au vu du sujet cela serait difficile. Tranquillement? Eventuellement. A l'abris des oreilles indiscrètes? Certainement. Relâchant sa pression dans la main de Dean, elle attendait qu'il en fasse de même. Le bar n'était pas l'endroit idéal pour aborder pareil sujet et Dean l'avait sans doute déjà comprit. Ophelia attrapait un plateau pour y déposer un verre à whisky et deux verres à shots, la bouteille de whisky et une de tequila. Elle n'aimait pas spécialement boire mais savait d'expérience que cela lui ferait du bien pendant leur discussion. Même si rester sobre serait mieux pour tout le monde, elle doutait que Dean n'en soit capable.

Alors Diaz lui avait avouer. Il avait réussit à se confier malgré sa peur. Ophelia était à la fois fière de son meilleur ami mais aussi triste. Que ces horreurs continuent encore de lui arriver mais que Dean ait à en porter le poids lui aussi. Elle connaissait ses amis, et Dean ne pourrait pas rester impassible. Elle ignorait ce qu'il serait capable de faire et c'était justement cela qui l'inquiétait. La pointe de rage qu'elle avait réussit à déceler dans son regard l'effrayait, ça, et la force de sa poigne lorsqu'il avait retenu sa main.

Allez, viens!